Le Babel Med Music Festival a duré 3 jours, du Jeudi 20 au Samedi 22 Mars. Cette 10ème édition a rassemblé 200 artistes, 2 500 professionnels, avec une trentaine de concerts prévus sur 3 jours et 3 nuits. En effet, le Babel Med Music ne commence pas le soir à 19h30 mais dès le matin à 10h avec, les journées, des exposants et différentes conférences organisées autour de la musique et de la culture au sens large. Retrouvez toutes les informations à ce sujet sur le site web du Dock des Suds.

L’’ambiance du Dock des Suds est très familiale et détendue, dans ce festival de musiques du monde. On croise des personnes de tout âge, de toutes nationalités, des italiens, des russes, des irlandais http://secured.onlinegambling2014.com, des papas poules et leurs bambins sur les épaules. Certains parents courent désespérément derrière leurs enfants qui galopent dans tous les sens. D’autres laissent faire et sont accoudés aux différents snacks qui proposent des pizzas, de la pâtisserie marocaine et tunisienne, du thé à la menthe, des huitres et même des oursins. C’est le bazar et le Babel Med Music Festival peut commencer. Voici, jour par jour, ce que nous en avons pensé…

(Cliquez sur la toute petite barre horizontale rouge pour accéder plus rapidement au live report de la soirée suivante!)

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JEUDI 20 MARS

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Imzad – Le blues saharien des touaregs du Sud-Algérien

Totalement néophyte dans ce style, il n’est pas difficile pour le public de trouver le rythme. Les jeunes touaregs, habillés en tenues traditionnelles, nous font voyager. La musique est vivante et spontanée. La basse répond au gumbe. La voix de la seule femme sur scène répond aux deux voix masculines. Les gens battent le temps dans leurs mains. Les enfants présents, aussi novices que leurs parents, ont les yeux ébahis, la mâchoire pendante et risquent des sourires quand ils entendent la chanteuse du groupe qui commence à chanter. Guitares électriques à la main, les deux autres membres du groupe instaurent un rythme sautillant. Ajouté au refrain traditionnel chanté par l’ensemble du groupe, comme une seule voix, ce denier prend la route du blues hypnotique et continue à nous faire voyager dans les régions du sud algérien. Personne ne voit venir le dernier morceau, le rythme s’accélère. La plupart des gens, entrainés par ces rythmes mêlant traditions, hip hop et blues, dansent sans retenue. Le gumbe et la batterie s’offrent un dernier duel, les mains sont levées, le public s’amuse et applaudit.

Ce groupe est absolument à écouter et voir si vous avez envie de découvrir le blues nord-africain. Une perle. Pour les retrouver voici leur chaîne :

Sissy Zhou – L’émouvante virtuose du Gu Zheng millénaire chinois

La Chine était à l’honneur ce jeudi, et ceci grâce à l’impressionnante Sissy Zhou.  Dès l’âge de 6 ans, la jeune chanteuse-instrumentiste suit l’apprentissage du Gu Zheng, cette imposante cithare à corde pincées dont l’origine remonte à plus de 4000 ans.

Le changement d’atmosphère est total. Dès qu’elle amorce un morceau, le silence se fait autour de l’instrument aux 21 cordes. Les gens parlent à voix basse. Puis elle commence à chanter et l’assemblée se tait. Grâce à son instrument mais aussi  à la légèreté avec laquelle elle en joue, Sissy Zhou emplit l’espace d’une atmosphère aérienne et nous transporte. À la fin du premier morceau le public applaudit comme au théâtre. En silence. Certains crient bravo. Personne ne siffle. Elle introduit son deuxième morceau en français, Fleur Magnolia : « C’est une chanson pour toutes les mamans dans le monde ». Habillée d’une robe traditionnelle chinoise rouge, elle instaure un paysage auditif merveilleux, on croirait faire partie d’un des univers des films de Hayao Miyazaki. A la fin du morceau le public applaudit quand elle baisse les bras derrière son instrument. Malgré les pauses dans le morceau, personne n’osait l’interrompre, attendant le signal pour la féliciter. Entre deux morceaux, on se surprend à ré-entendre le brouhaha de la salle centrale et de la salle des sucres qui sont derrière nous. Pour son dernier morceau, Sissy Zhou change d’instrument car celui-ci a une autre tonalité. Sur cette chanson, elle nous confie qu’elle a gagné le premier prix en Chine en 2001.  L’assistance est sans voix et totalement émerveillée après ce morceau d’une intensité folle.

Comme le groupe précédent, Sissy Zhou est à écouter et voir si vous voulez découvrir la musique traditionnelle chinoise ou que vous êtes amateur de musique calme et relaxante.

Retrouvez  la sur Facebook. Et écoutez la sur sa chaine Youtube :

Mor Karbasi – La diva moderne du Ladino

Arrivée au Cabaret Rouge, le chapiteau bleu installé pour l’occasion est plein à craquer. Le concert a commencé depuis une dizaine de minutes quand nous arrivons. L’atmosphère est plus festive que pour Sissy Zhou mais, de même, dès que la diva commence à chanter, le silence se fait. Sa voix est portée par une guitare sèche, un violoncelle et une batterie. Avant de commencer le prochain morceau, elle décrit le paysage où la scène se passe. Une plage, la mer Méditerranée, le sable chaud et une dune couverte d’herbe jaunie. Le cadre est posé. Elle chante d’une voix puissante et langoureuse, mélangeant les traditions de ses racines juives, marocaines et iraniennes, crispant sa main gauche. Tenant son micro dans sa main droite, sa voix résonne sous le chapiteau. Les instruments l’accompagnent, le batteur pose le rythme, le violoncelliste joue avec ses doigts avant de prendre son arche, la guitare est mélodieuse. Mor Karbasi entame une nouvelle chanson, Roza, quelle dédicace à sa mère. Elle revient sur scène vêtue d’une robe rouge à la mode flamenco. Le cadre, son vibrato, sa gestuelle et les instruments nous transportent jusquen Andalousie, on traverse la mer Méditerranée pour retrouver des sonorités berbères et finissons à lest, en Israël, son pays natal.

Encore une belle découverte pour les amateurs de musique andalouse et arabe.

 Retrouvez son actualité sur son Facebook. Et découvrez la sur sa chaine Youtube : 

Rabih Abou-Khalil – Le jazz aventurier du maestro libanais (ou le papy musicien qu’on aurait rêvé avoir)

Après un premier morceau entièrement instrumental, Rabih Abou-Khalil accompagné de sa luth, se présente ainsi que son brillant quintet méditerranéen (tuba, hautbois, guitare électrique et batterie) avec beaucoup d’humour. En effet, il raconte des histoires alambiquées, se moquant de la nationalité de chacun. Français, Italiens, Sardes, Brésiliens, Iraniens, Libanais, Afghans, Turques, Allemands, Portugais, etc… Tout le monde en prend pour son grade. Le public rigole énormément. Enfin il présente le chanteur qui interprétera les paroles des chansons du concert. Le maestro libanais explique que les chansons suivantes sont des reprises de poèmes et de chants portugais qu’il a ajustés et auxquels il a ajouté une partition instrumentale. Le jazz sans frontières aux rythmiques tourbillonnantes, charmeuses et ardentes propre à Rabih Abou-Khalil prend place dans la Salle des Sucres du Dock des Suds. Entre chaque morceau, le jazz man chuchote pour nous expliquer la signification ou le cadre de la chanson qui va suivre. Les tonalités se succèdent, les rythmes s’enchainent, les instruments accélèrent puis soudain ralentissent avant l’essor de la voix. Le groupe commence, Como um rio, (comme un fleuve). Le public se balance, sourire aux lèvres à la fin du morceau qui raconte une histoire que même ceux qui ne parlent pas portugais comprennent. Tout au long de la représentation, Rabih Abou-Khalil se fait plaisir et transmet son bonheur au public. Le tuba et le hautbois se taquinent, les deux sont portés par la batterie. Le chanteur portugais et le compositeur libanais se regardent et rigolent. Les maîtres mots sont légèreté et joie de vivre. Les gens rient, applaudissent, crient, on assiste à une vraie séance de bonheur collectif.

C’est une des interprétations que nous avons le plus aimé dans cette soirée. Rabih Abou-Khalil, compositeur exceptionnel à la carrière colossale (20 albums) est à découvrir d’urgence. 

Retrouvez ses œuvres sur sa chaine Youtube.

Fargana Qasimov Ensemble – L’étincelant joyau féminin du mugham azéri et ses quatre compères

Tout droit venue d’Azerbaïdjan, Fargana Qâsimov, fille du maître de musique Alim Qâsimov, a interprété avec élégance et respect des traditions le mugham, genre traditionnel et savant de la musique azérie. Sa capacité à percher haut sa voix et sa grâce naturelle, accompagnées des mouvements musicaux du târ (luth à onze cordes) et du kamânche (vièle à quatre cordes), d’un tambour et d’une flûte traditionnelle, créent un univers difficilement descriptible. Accompagnée de ses quatre musiciens, Fargana Qasimov livre une performance hors du commun et totalement atypique. Emplissant la salle de notes harmonieuses, les instruments établissent des bases solides laissant place, sans la gêner ni l’effleurer, à la voix puissante et envoûtante de la chanteuse.  Le public est réduit au silence, savoure et profite. La musique joue avec nos émotions enchaînant entre légèreté, tristesse et beauté, le tout est d’une pureté rare. Les cordes répondent à la flûte, Fargana Qasimov enchaîne les paroles, ne s’arrête jamais, on en vient à se demander quand elle reprend son souffle. L’atmosphère est détendue, les seuls  signes que l’on voit émaner du public sont des torses qui bougent, des têtes qui tanguent, des sourires jusquaux oreilles et des regards candides et admiratifs. La puissance vocale de la chanteuse est très impressionnante. Le concert se finit par une standing-ovation du public qui remercie l’interprète et ses musiciens pour ce beau moment d’harmonie musicale vécue en leur compagnie.

Jupiter & Okwess International – Le groove ethno-futuriste des fiévreuses nuits de Kinshasa 

Ce groupe a clairement et tout simplement réalisé la performance la plus groovie et la plus dansante de la soirée. Arrivant les uns après les autres en commençant par le batteur, suivi par le beatboxer, le bassiste (électro acoustique) , le guitariste (électrique) puis enfin le chanteur, le groupe démarre sur les chapeaux de roues. En trente secondes tout le monde s’est mis à danser. Le beatboxer joue également avec deux petites maracas et le chanteur a devant lui deux immenses gumbes. Avant de commencer le deuxième morceau, le chanteur explique que quand il était jeune à Berlin-Est, avant la chute du mur, les « petits blancs » l’appelaient le « neger » mais que lui contrairement aux autres, il pouvait passer le mur à sa guise car son père était diplomate congolais. La musique est diabolique, tout le monde danse dans une totale démesure et avec une profonde liberté. Le guitariste s’éclate sur de nombreux solos sur lesquels le bassiste le rejoint. Ils sont sur scène comme des gamins, faisant la grimace, appelant à la révolution, à la révolte, parlant d’alcool, critiquant les générations passées « n’ayant rien foutu ». Le public sourit et une euphorie collective démente et incontrôlée prend forme. Après le dernier morceau, le groupe est ovationné !

Retrouvez ici leur biographie. Écoutez ça !

Et découvrez leur univers militant et leurs vies au quotidien à Kinshasa :

Sväng – Les audacieux finnois et leur armada d’harmonicas

Audacieux, c’est le mot qui convient. Il faut absolument être Finnois pour tenter un coup pareil. Quatre acolytes, chacun un harmonica (différent) devant les lèvres livrant une prestation de 35 minutes sans s’arrêter et sans aucun autre instrument. Alternant les rythmes balkaniques, jazz, tango et nordiques, le groupe est assez ingénieux pour que l’on n’ait pas envie de quitter la salle au bout de 15 minutes. Cependant nous devons avouer que l’on se lasse tout de même au bout d’un moment.
Pour plus d’informations, voici leur page Facebook
Et voici un exemple de leur représentation :

Malheureusement nous n’avons pas pu voir les représentations de Fareeq El AtrashG.A.B. et Neuza, faute de temps. Nous nous en excusons et nous sommes absolument sûrs que c’était tout aussi bien que les artistes que nous vous avons présentés ici.

Victor

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VENDREDI 21 MARS

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Vendredi, la soirée était particulièrement riche musicalement et qualitativement parlant. C’est d’abord la musique kurde d’Orient qui a retenu notre attention à travers Nishtiman. Ce groupe, formé de musiciens bien évidemment kurdes mais également iraniens, irakiens et turcs ont emballé le public grâce à leurs compositions saisissantes et émouvantes tantôt lentes, tantôt dansantes. Ils alternaient les solos, duos et trios de kamanché, tambur et duduk avec les morceaux tous en coeur. Leur performance inégalée a révélé leur talent scénique et leur passion pour la musique traditionnelle modernisée. Hussein Zahawy et ses musiciens ont joué remarquablement, faisant honneur au Kurdistan.

Nous sommes ensuite allés écouter la voix rocailleuse de Gianmaria Testa nous bercer sur ses chansons alliant jazz, blues et folk. Ce chanteur italien nous fit d’ailleurs un long récit d’un de ses périples à Paris. Nous étions nombreux, captivés par son histoire et son accent. Ses chansons étaient douces et chaleureuses, ce fut une belle ballade en Italie que Gianmaria Testa et ses musiciens suggéraient là.

Gianmaria Testa

Gianmaria Testa à Hannovre, Allemagne, le 17 Février 2010. Photo: Martin Steiner

C’est alors que nous découvrîmes la radieuse Rita. Cette femme originaire d’Iran vit en Israël, pays dont elle est la chanteuse la plus célèbre. Elle nous raconta à quel point ses textes étaient engagés et à quel point elle était connue en Israël. Et on a vite compris pourquoi : elle et ses musiciens firent un véritable spectacle qui séduit toute la salle.  Toute la scène débordait d’énergie. Pleine de joie, elle chantait et dansait tout en lançant des regards complices à ses musiciens et en soulevant avec elle le public, conquis. 

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Et le meilleur pour la fin, nous parlons de ceux qui nous rendus… Dengue Dengue Dengue!.Véritable coup de coeur de la soirée, les jeunes péruviens portant des masques ethniques à la SBTRKT  – ils ont joué en première partie de Manu Chao dans leur pays natal – ont fait vibrer tous les festivaliers sur leur électro-cumbia. L’Amérique latine était ainsi dignement représentée à travers psychédélisme, dub-step, drum’n bass et chamanisme… Mais le show n’était pas seulement sonore, il était aussi visuel : les deux DJs – également producteurs audiovisuels – étaient accompagnés d’une jeune femme et ont projeté durant leur set des vidéos et images psychées et colorées. Ecoutez ce mix assez représentatif de leur prestation de vendredi (moins énergique qu’en live quand même). Captivant.

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Julie

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SAMEDI 22 MARS

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Lors de cette dernière soirée au Dock, le Babel Med Music Festival a, avec succès encore une fois, réussi à programmer des artistes de qualité venant du monde entier. Samedi 22 Mars, nous avons eu trois coups de coeur : un de la Jamaïque, un de La Réunion, et un de Cuba.

CLINTON FEARON & Boogie Brown Band (Jamaïque)

L’ancien bassiste et choriste de The Gladiators (1969-1987) fait carrière solo pour le plus grand plaisir de nos oreilles ! Et c’est devant nous à Marseille que Clinton Fearon s’est produit samedi, jouant avec sa bande du très bon reggae roots folk-blues acoustique comme il sait le faire. Et l’on dansait, détendus et heureux à l’écoute de la voix du soulman plus tout à fait jeune. Des fans brandissaient des banderoles à l’effigie de l’ancien membre du mythique groupe jamaïcain des années 70 pendant que d’autres, les bras aussi en l’air, les bougeaient lentement d’un côté puis de l’autre. Les festivaliers étaient à fond, connaissaient les paroles de Clinton par coeur et plusieurs générations jouaient des coudes pour pouvoir être le plus près possible de la scène. Un moment apaisant, agréable et nostalgique à la fois.

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MAYA KAMATY (La Réunion)

Lauréate du 4ème Prix Musiques de l’Océan Indien, Maya Kamaty a littéralement envoûté les festivaliers de sa voix folk et créole. Riches d’influences indiennes et africaines dans sa musique, la fille de Gilbert Pounia a su surpasser l’héritage artistique de son père, leader de Ziskakan, groupe phare de la scène réunionnaise. La musique de la jeune créole à l’accent bien marqué est très vivante et s’apparente à du blues métissé emprunt de maloya traditionnel. Maya Kamaty et ses musiciens utilisent le roulèr, le kayanb,… autant d’instruments qui font le charme et l’originalité de ses morceaux. Et notamment en live. Une belle performance donc, mais également une découverte à suivre, car un album doit bientôt voir le jour…

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RUBEN PAZ & CHEVEREFUSION Feat Papet J (Cuba)

Ruben Paz & Cheverefusion était le groupe parfait pour clôturer le Babel Med Music ! Melange de samba et d’afrobeat, le tout assaisonné de jazz, le groupe marseillais originaire des Antilles a dynamité le festival. Ruben Paz est le leader du groupe. Saxophoniste, flutiste mais aussi chanteur, originaire de la Havane, il mène Cheverfusion, une équipe de musiciens aguerris originaires de la cité phocéenne, sur les sentiers du groove et de la cumbia. Mention spéciale au deuxième chanteur qui possédait une maîtrise vocale impressionnante. De plus ses rares moments rappés étaient particulièrement efficaces. La tonalité des morceaux frappait de part la multiplicité des influences. Nous avons eu l’impression de voyager de la Méditerranée à New York en passant par Cuba. L’harmonie des musiciens était assez remarquable lors de concert. Nous avions l’impression que les musiciens jouaient en symbiose. Les notes ne se marchaient pas les unes sur les autres, et l’ensemble musical progressait assurément dans une direction bien précise. Cela peut paraître abstrait et légèrement naïf car un groupe se doit de jouer en cohérence mais l’impression était ici véritablement probante. Par conséquent, les élancées musicales des artistes frappaient d’autant plus fort. A la fin du concert, Papet J de Massilia Sound System a rejoint la scène. Beau geste d’éclectisme de la part de Ruben Paz car le Marseillais a apporté avec lui un vent de ragga, bien qu’il se soit vite essoufflé. La première partie du concert était de meilleure qualité.

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Rédigé par

Julie Lab

Former Member