Une série qui perd son show-runner peut sembler inconcevable. Pourtant, les exemples de séries orphelines sont nombreux: The Walking Dead sans Frank Darabont, Smallville sans Alfred Gough et Miles Millar, Supernatural sans Eric Kripke, et plus encore… Et c’était avec tristesse que j’avais appris le départ de Dan Harmon, créateur et producteur exécutif de Community sur la chaîne de network NBC. C’est ainsi qu’a commencé sans Dan Harmon la saison 4 de Community en février dernier.

De quoi ça parle ?

Vous connaissez ces séries aux pitchs totalement sans rapport avec l’évolution de leurs intrigues ? Community en fait partie. En résumant très vite, on pourrait dire qu’il s’agit d’un groupe d’étude au sein d’une faculté publique très low-cost. Ni Harvard ni Princeton, Greendale est une faculté fictive de bas niveau qui accueille les étudiants de tous bords (vieux, jeunes, ratés, mères au foyer).

Étrangement, le pitch de Community n’est pas complètement mensonger (cf. Cougar Town), à l’exception d’une chose: ce groupe d’amis n’a rien du groupe de New-Yorkais de Friends (pour les plus jeunes d’entre vous pensez à How i Met Your Mother, pour les plus vieux pensez à Seinfeld), et le héros n’est pas celui qu’on croit.

Community n’a pas de réel sujet: ni l’amitié, ni l’amour véritable, ni la [douloureuse question de l’intimité->http://dynamhit.org/Girls-retour-des-enfants-prodigues] ou de l’intégration. Community nous parle des difficultés que traversent les névrosés que nous sommes, mais en particulier de la difficulté de vivre en étant qui l’on est. Et si vous pensiez que le héros était le charmant Joel McHale (Jeff Winger dans la série), vous vous trompez lourdement: Abed Nadir, l’étrange side-kick au syndrome d’Asperger [[Le personnage d’Abed est d’ailleurs directement inspiré de l’expérience de Dan Harmon, atteint lui aussi de ce syndrome]], est le véritable héros de l’épopée Community.

Ceci n’est pas un échec scénaristique (vraiment?)

Commençons par un axiome auquel tout lecteur devra se faire: Community est une excellente série (si ce n’est une des meilleures séries produites ces 10 dernières années)[[Si vous ne me croyez pas, checkez [cette vidéo->http://youtu.be/YanhEVEgkYI]]], et pas seulement pour ses références à la pop culture, ni pour ses saynètes de fin d’épisode, ni pour ses épisodes spéciaux ou pour son humour saugrenu.

J’étaie rapidement mon avis avant de passer au sujet principal: si Community est une série aussi géniale, c’est parce qu’elle prend toujours le risque d’être ce qu’elle est. C’est-à-dire un ovni télévisuel. Pas d’applaudissements enregistrés, pas d’humour politiquement correct (à la HIMYM), pas de caricatures ou de simplifications. La série est drôle parce qu’elle est drôle [[Criez à la tautologie tant que vous voulez, je persiste et signe !]]. Elle s’assume complètement, et ose discuter de tout avec humour et délicatesse (ex: Abed’s Uncontrollable Christmas).

Mais si la série était aussi excellente, c’est qu’elle était orchestrée par une personne très particulière. Si Dan Harmon a réussi à créer cet univers très particulier, c’est parce qu’il comprend parfaitement ses personnages et sait rendre leurs relations cohérentes. Ma crainte était donc que son départ mène à la mort de l’esprit Community.

Paradoxalement, son départ est l’occasion de comprendre sur quoi repose Community, et si le show a une réelle existence en dehors de son créateur. La réponse n’est pas simple, puisque les débuts de la saison 4 n’auguraient rien de bon: Abed était de plus en plus caricatural, l’intrigue de Chang semblait presque tirée par les cheveux, et les relations entre les personnages semblaient stagner (excepté pour Britta et Troy, au grand dam des fans).

Pourtant, je ressens de l’espoir depuis l’épisode Herstory of Dance qui redonne de l’épaisseur à Abed, écarte l’intrigue de Changnesia du tableau (du moins pour un temps) et laisse les relations Jeff-Britta et Britta-Pierce évoluer naturellement (la relation Jeff-Pierce avait d’ailleurs commencé à changer dernièrement).

Finalement, Intro to felt suburgatory (dernier épisode sorti) m’a convaincue que l’échec pouvait être évité. L’épisode ne fait pas réellement avancer l’intrigue ou les relations entre les personnages, mais il pousse encore le show vers l’audace en introduisant des marionnettes cette fois-ci. De quoi espérer que Community est vraiment entre de bonnes mains ?

Ne crions pas victoire trop vite, car il reste encore une douzaine d’épisodes avant d’annoncer le verdict. Pourtant, je reste optimiste sur les capacités des nouveaux scénaristes et sur leur habileté à comprendre le méta-langage que maîtrise Dan Harmon.

En guise de fin d’article, voici une petite vidéo bonus:

Rédigé par

Marie Ozymandias

Former member