Mehdi YZ nous a reçu dans les locaux de son label 13e art. Il débute sa carrière il n’y a même pas 2 ans que la plupart de ses clips comptabilise déjà le million de vues sur Youtube. Entre galères et souvenirs de quartier, cet artiste marseillais vous embarque dans son univers. Bienveillant, ce grand amateur d’Angèle évoque son passé, ses motivations, nous permettant de tracer son parcours.

 

« C’était important pour moi de ne pas rester à rien faire, de ne pas perdre mon temps »

 

Mehdi se définit lui-même comme un mec de la rue ayant fait ses propres choix « Moi à la base j’ai étudié la rue, mais je suis allé à l’école comme tout le monde, j’étais en internat en bac pro électrotechnique, j’en pouvais plus je me suis fait virer. 2 ans après j’ai repris un bac pro vente. On ne peut pas choisir de revenir en arrière, mais si j’avais pu j’aurais fait des études dans le commerce ». Ce mec de cité, qui aurait rêvé de faire du cinéma, a toujours été un débrouillard, fort de son expérience et de son envie de réussir. « J’ai travaillé pendant 2 ans quand j’étais jeune, je livrais avec mon scooter. C’était important pour moi de ne pas rester à rien faire, de ne pas perdre mon temps. J’ai toujours fait de l’argent, qu’il soit légal ou illégal ». Il n’était pourtant pas destiné à rapper « c’est la galère qui m’a fait rapper. Je voulais réussir dans quelque chose qui me plaît. C’est mon ami Mero Mero qui m’a dit que je devais faire un choix entre essayer de rapper et rester dans la rue à faire des conneries. Je me suis donc dit « j’essaye, si ça ne marche pas j’arrête ». J’ai donc mis en ligne sur youtube le freestyle 0, il n’a pas fait de vues j’étais dégouté, je voulais arrêter. Ensuite il y a eu le planète rap j’ai fait « arrah », je l’ai ensuite posté sur youtube et ça a commencé à prendre. »

 

https://www.youtube.com/watch?v=T5zuVvBGoOs

 

« Même CR7, il a des problèmes qu’il ne peut résoudre, ce n’est pas seulement dans le rap » 

 

Remarqué au planète rap de Jul pour ses performances de freestyler, Mehdi a vu son buzz monter très vite. De ce même fait, les comparaisons avec son pote de quartier Jul ont commencé à naître, inévitable lorsqu’on vient de Saint-Jean du Désert.

Pourtant Mehdi est resté fidèle à lui-même « Je n’ai pas changé de style, je suis toujours le même depuis 2004, je suis bon vivant. Certes, quand y’a un clip dans le quartier, je viens je prends mon scoot ou ma moto, je lève, je fais des doigts et on rigole. Si y’a des gens qui m’identifient à Jul, ils peuvent parce que on vient du même quartier, on a grandi avec lui dans le quartier, aussi avec sa musique, mais on essaye tous de se diversifier. Que ce soit Hors Ligne, qui a des bonnes punchlines, Moubarak ou Norey, on raconte le même quotidien mais chacun à sa manière, le thème reste la rue».

 

Le rappeur fraîchement signé chez 13e art reste fidèle à ses amis et ne se voit pas rentrer dans un groupe de rap « Mon collectif, La Puenta Records, c’est dans la vie privée, c’est mes amis. Être dans un groupe, ça peut porter défaut, il peut y avoir des quiproquos, des mésententes. Au moins quand je suis tout seul, c’est mes problèmes, mes choix, mes succès. La musique ça peut briser des rêves et des amitiés, il ne faut pas tout mélanger. ». Il l’a bien compris, le milieu du rap est parfois dur en affaire, pourtant son vécu le fait positiver au moment de tirer un bilan sur ce milieu « Dans le rap, les murs ont des oreilles, c’est un milieu de chiens morts, mais dans la vraie vie c’est pareil, on est habitué. Il faut faire attention à ce qu’on dit, ce qu’on fait. Mais je pense que dans la vie on a toujours à faire avec ces problèmes, que tu commences dans la musique ou que tu aies 5 disques de platine t’as toujours des problèmes. Même CR7, il a des problèmes qu’il ne peut résoudre, ce n’est pas seulement dans le rap ».

https://www.youtube.com/watch?v=2kYR_OjYGVk

 

 

« Ma mère n’a plus peur que les flics viennent sonner chez elle. Mais le plus important, c’est de faire sourire mes parents et de réussir en faisant ce que l’on aime. » 

 

Mehdi YZ est un travailleur, au moment d’écrire ses textes, le MC se prend la tête sur ses punchlines, il le dit lui-même « Je ne fais pas des rimes pour faire des rimes ». Son rap cru si bien travaillé, c’est dans des morceaux comme « madame » ou « nique ma vie » que le rappeur se lâche « C’est 100 fois plus facile d’écrire ces morceaux. Par exemple, pour Madame, j’ai le thème, ça sort tout seul, c’est fluide. Pour Nique ma vie (mettre le lien), lorsque j’ai entendu l’instru, j’ai directement pensé à ça ! J’ai même voulu aller tourner le clip au bled ! mais je ne pouvais pas à ce moment-là, du coup je suis allé à Noailles, c’est comme au bled ». Dans ce clip, il se balade dans les rues de Marseille, son succès naissant lui permet encore de faire des tours en centre-ville, il va être reconnu et faire sa vingtaine de photos « mais je ne vais pas créer une émeute ».

 

Mehdi regrette parfois de ne pas pouvoir se balader tranquille dans les rues, de faire ses courses ou d’aller boire un coup sans être reconnu « Quand tu es de mauvaise humeur, tu as envie de parler avec personne, mais les gens sont contents de te voir du coup tu dois faire l’effort. Je les comprends, moi aussi étant jeune j’aurais aimé parler et prendre des photos avec un rappeur que j’écoute ». La tête sur les épaules, il sait que les bons côtés de la notoriété sont plus importants et se rend compte du bonheur qu’elle procure « ça fait plaisir que les gens connaissent tes textes par cœur, les gens dansent sur mes sons, ils me reconnaissent. De plus, ma mère n’a plus peur que les flics viennent sonner chez elle. Mais le plus important, c’est de faire sourire mes parents et de réussir en faisant ce que l’on aime. ». Sa notoriété, selon lui, lui permet de survivre plus que de vivre pour le moment « je m’habille, je mange, je bois, mais je ne vais pas te dire que je suis en train d’investir dans une villa ».

 

https://www.youtube.com/watch?v=qlMKwJ-F4Vo

 

« Quand je voulais écouter des mecs qui rappent ma vie j’écoutais Puissance Nord »

 

Côté rap game, l’artiste ne se voit pas faire des feat pour faire des feat « si le mec peut me mettre en lumière, qu’il est vrai et qu’il rappe bien, ça peut se faire ». L’artiste ne se mélange pas non plus dans ses fréquentations « Je m’entends bien avec tout le monde comme je ne m’entends bien avec personne. Tu vois ce que je veux dire ? Je n’ai pas d’amis rappeurs, bien-sûr j’ai des bons rapports avec les  rappeurs que je côtoie, on se parle quand on se croise. Et les rappeurs de mon quartier je ne les considère pas comme des rappeurs mais comme des amis, quand je suis avec eux, je suis Mehdi pas Mehdi YZ. »

 

Mehdi Yz regrette l’époque où le rap se faisait sans vocodeur, il se serait bien vu rapper à cette époque. Il y trouve d’ailleurs son inspiration. De Rohff à la Fonky Family en passant par Kamelancien. « J’écoutais aussi bien du Sexion D’assaut que du Puissance Nord. Quand je voulais écouter des mecs qui rappent ma vie j’écoutais Puissance Nord, ils parlent de tel coin tel quartier de Marseille, de ce qui se passe ici, je me reconnais dans les sons. Mon classique c’est Rohff à l’ancienne, le code de l’horreur ou la fierté des nôtres. J’adorais cette époque dans le rap, mais le rap et les rappeurs évoluent. C’est comme si je te dis qu’avant il y avait Ronaldinho et maintenant t’as Mbappe. ». Comparable au jeune prodige français niveau productivité, Mehdi dit avoir de quoi envoyer 3 albums en stock, mais préfère toucher le plus de monde possible avant d’envoyer un projet. « Je vais rafaler youtube avant, Youtube a sorti beaucoup de monde de l’ombre. Mais maintenant, si tu ne pars de rien, que personne ne te connaît et que tu ne connais personne dans ce milieu, ça va être dur. Pourtant, je pense que quelqu’un qui a la dalle, et qui rappe vrai peut toujours percer ! C’est toujours pareil, si t’aimes ce que tu fais, que tu restes fidèle à toi-même, continue et tu réussiras. »

 

https://www.youtube.com/watch?v=_ZncYHo2eRA

 

Bon vivant, Mehdi YZ a su se faire une place dans le rap en restant fidèle à lui-même. Il s’impose depuis presque deux ans grâce à son rap cru et efficace. Son franc parler et son authenticité plaisent de plus en plus. Et si c’était bien ça la recette pour percer ?