Furax Barbarossa - Dynam'hit - Mona Lisa - Rap - Webradio - Interview

En ce début de décennie, nous avons choisi à Dynam’hit de vous proposer des artistes qui ont marqué la décennie précédente sans pour autant avoir une couverture médiatique exceptionnelle. Notre premier épisode vous faisiez découvrir Furax Barbarossa : Le roi de la rime. Depuis Furax nous a fait l’honneur de nous donner une longue interview pour approfondir le sujet. 

Dans une interview de nos confrères de keskia, tu racontes que tu commences à « gratter » des textes devant un mur de son. Dans l’imaginaire collectif les murs de sons représentent souvent les « teufs » ou même les « raves party », es-tu quelqu’un passionné à la base de musique électronique ? 

« Avec un buvard double face, on est passionné par n’importe quoi (rires), mais non je n’ai jamais été un grand fan de musique électronique, je mixais uniquement du Hip-Hop. Je n’en mixais pas,moi je m’occupais de jouer du Hip Hop plus tôt dans les journées avant que mes potes viennent passer de la Hardcore. Je n’ai jamais produit une musique électronique, ça ne m’a jamais attiré ».

Justement pour ton rap, on a tendance à dire que tu es un rappeur qui privilégie le fond à la forme notamment dans l’écriture, est-ce que déjà tu es d’accord avec ce que je te dis là ?

« Non je suis pas d’accord, les deux sont importants selon moi, par exemple j’essaye d’aérer mes textes, de faire des rimes qui ont vraiment du sens et qui ne sont pas seulement des phrases qui riment entre-elles. Je ne vais pas m’amuser à envoyé des rimes à 12,13,14 syllabes juste pour dire que je le fais, des fois une rime avec seulement 5 vaut beaucoup mieux si elle a justement un sens »

Justement toi qui fais souvent des rimes avec 12,13,14 syllabes, est-ce que l’écriture est une torture ou c’est devenu naturel à force ?

« Je ne le fais pas parce que c’est naturel, plutôt parce que je ne sais pas faire autrement. Faire de la rime à deux syllabes ne m’intéresse pas. Oui, c’est sûr que j’ai une gymnastique qui est devenue naturelle et j’arrive plutôt bien à faire ce que je veux avec la langue Française mais ça me prend beaucoup de temps »

Et pour écrire, dans quel contexte es-tu ? Beaucoup de rappeurs racontent qu’ils s’enferment seul, je pense notamment à SCH qui raconte écrire dans le noir, toi dans quelle posture te mets-tu ? Tu écris plutôt sur papier ou sur ton téléphone par exemple ?

« Franchement moi ça dépend, je suis capable d’écrire en studio avec 10 personnes autour de moi qui écrivent aussi, tant que j’ai mon téléphone et une connexion internet. Mais plus généralement, j’écris beaucoup seul dans ma voiture ou chez moi. Pour ce qui est du support, depuis l’album Dernier Manuscrit (d’où le nom de l’album) , j’ai arrêté d’écrire mes textes à la main. Je suis passé au téléphone pour une question pratique, pour notamment ne pas avoir à recopier mes textes au moment de sortir mes morceaux ou albums ».

Autre chose que nous avons remarquée à Dynam’hit, tes clips sont très travaillés, est-ce que tu essayes de faire passer des messages parfois politiques justement par la vidéo, je pense notamment au clip de Mona Lisa qui peut peut-être s’inscrire dans les débats actuels ?

« Tu sais les gens en font ce qu’ils veulent, personnellement dans ce clip il n’y a aucune arrière-pensée politique, le clip sert uniquement à mettre en images le morceau. C’est tout simplement du cinéma. C’est plutôt le morceau qui fait passer à la limite un message : Pourquoi ferais-je l’effort de paix ? Le clip est vraiment un fil rouge qui permet de saisir le thème du morceau, pas plus. »

 

Tu as répondu sur Instagram à des questions sur ta vie personnelle. Tu racontes que depuis maintenant 8 mois tu essayes de vivre uniquement du rap, est-ce qu’on peut te demander de quelle façon tu gagnais ta vie avant ?

« Oui, j’étais chauffeur routier dans le bâtiment. Je conduisais des camions-grues. »

Est-ce que tu penses qu’avec ton style aussi singulier, il est difficile d’apparaitre dans les médias, même si tu as quand même quelques apparitions à ton actif ? Est-ce que par exemple tu t’es déjà posé la question d’arrêter le rap par manque d’exposition et de reconnaissance ?

« Je suis apparu dans certains médias mais uniquement parce que je connaissais  quelqu’un qui connaissait quelqu’un dans ces mêmes médias. Sinon nous les rappeurs indépendants on est inexistants. Je n’arrêterais pas tant que j’ai du plaisir à faire ce que je fais, si à 50 ans  j’ai encore ce plaisir, je serai encore là. Après oui je vois ce que tu veux dire c’est un investissement énorme comparé aux retours que l’on peut avoir derrière. Puis c’est sûr que lorsqu’on voit ce qui marche aujourd’hui… après ça sert à rien de cracher sur tout le monde, la musique a évolué les goûts avec. Par exemple dans le morceau Fin 2012, on sent peut-être une certaine lassitude car c’était le dernier morceau de l’album Testa Nera pour lequel, je m’étais torturé l’esprit. Mais seulement 3 mois après, j’étais déjà en studio pour l’album de Bastard Prod prêt à en découdre. Donc oui je me suis déjà posé la question mais ce n’est pas d’actualité ».

Justement tu as un nouvel album de prévu en 2020, est-ce qu’on va avoir le droit à des changements sur cet album ? Est-ce que par exemple un mec comme Guilty avec qui tu collabores peut t’apporter d’autres choses pour évoluer dans ton style ?

« Un mec comme Guilty connaît bien la musique, il a une grande oreille. Il est là pour essayer de moderniser un peu mon rap, chose que je fais déjà de moi-même avec le choix de mes prods. Je n’ai pas non plus envie de stagner. On aura peut-être un peu des morceaux un peu plus chantants, mais en même temps je ne m’éloigne pas trop de ce que je fais. Tu ne verras toujours pas de vocoder par exemple ou alors tu ne l’entendras pas (rires..). Mais oui, Guilty a souvent le mot juste pour débloquer une situation, où l’idée qui fait que que ton morceau prend du relief. J’aime parler avec ce mec parce que c’est mon frangin mais aussi parce qu’il est droit dans ses bottes et qu’il est sans filtres. Il n’y a pas de surprises avec lui et j’aime ça. J’ai beaucoup de respect pour lui « .

Tu en as déjà un peu parlé mais comment justement tu vois l’évolution du rap aujourd’hui dans un monde où il est plus facile qu’avant d’avoir de la visibilité (YouTube,Streaming ect..) ?

 » Je trouve que le rap qui marche aujourd’hui est très simple à faire, ca fait que le vase déborde et que l’on trouve tout et n’importe quoi. Des mecs qui n’ont jamais écrit de leur vie et qui se lancent du jour au lendemain en misant plus sur l’image. A côté de ça t’as des mecs qui savent très bien faire les deux et qui ont le succès qu’ils méritent, je pense notamment à Dinos, Maes, Alpha Wann ou Lefa. J’aime bien ce qu’ils font. »

En parlant justement de la logique ou pas du rap d’avant et d’aujourd’hui, on pose souvent cette questions, penses-tu que le rap se doit d’être engagé voire politique ?

« Il ne se doit pas, même s’il y a toujours cette fibre de la revendication au sein de cet art. Il peut permettre aussi de raconter des histoires par exemple. Alors c’est sûr que si ça raconte l’histoire d’un Palestinien ça peut devenir politique. Moi j’estime qu’il faut qu’il y est un peu de revendications, mais le rap a aussi besoin d’egotrip. L’artiste c’est justement selon moi celui qui aura la bonne harmonie entre les deux. »

Parlons un peu de ton public, beaucoup de tes concerts affichent complet et l’article que nous avons fait sur toi est l’un des plus lus et partagé de notre blog. On a l’impression que tu as un public très impliqué, comment tu vis ça en concert mais aussi dans la vie de tout les jours ?

« Tu sais quand on ne fait pas de musique commerciale, le public qui vient me voir en concert est plutôt passionné et impliqué. Ca me fait plaisir de voir que des gens s’approprient mes morceaux. J’ai un public plutôt torturé, mon rap parle aux fracassés de la vie. Scylla m’a dit un jour qu’on a le public que l’on mérite. Je suis plutôt d’accord. Des gens qui ont ramassé se reconnaissent. Certains me disent carrément que je les ai sauvé, dans un premier temps je suis content de pouvoir les aider, mais j’ai du mal à comprendre car moi de mon coté quand je ne vais pas bien, je ne peux pas écouter de la musique, il m’est impossible de m’accrocher à un morceau comme l’on s’accroche à une main les pieds dans le vide ».

Ce n’est pas trop oppressant comme posture ?

« J’irais pas jusqu’à dire que c’est oppressant. J’aime bien à la fin de mes concerts avoir un moment avec mon public, quelques fois certains vont trop loin. J’ai de plus en plus de mal par exemple avec les personnes trop alcoolisées et ceux qui trouve du satanisme où un deuxième sens caché, là où il n’y a rien du tout. Je reçois pas mal de menaces de mort par message, je vis avec, j’ai pas le choix. Je suis donc toujours équipé  pour recevoir ce genre de personne à l’improviste. Ici ou ailleurs… 

On va maintenant parler d’autres sujets que le rap. Tu le racontes et on le voit bien dans tes clips que le cinéma t’intéresse tout particulièrement. On te pose souvent la question de si tu vas jouer dans un film  ? Ou alors plutôt scénariste ?

« Oui cela m’intéresse, après c’est comme tout, il faut se donner les moyens de le faire, en travaillant et pourquoi pas en prenant des cours. Le cinéma est un milieu pire que la musique pour se faire connaître. Avec mon frangin Chill on a envie de réaliser des courts-métrages, on n’attendra pas qu’on nous ouvre les portes, on le fera nous-même. Moi je suis plutôt du coté scénario, j’arrive assez bien ensuite à mettre en images ce que j’écris. On écrit à deux avec Chill et ensuite, on profite de ses connaissances techniques pour tourner les scènes ». 

Et si aujourd’hui on te proposait de jouer dans un film ou de l’écrire quel serait ton style de film ?

« A regarder je suis plutôt science-Fiction, après j’aime écrire de tout, du drame, du mafieux, et aussi du suspense à rebondissements plutôt inspiré du cinéma anglais. J’aime vraiment les gros dialogues à la Audiard et le cinéma anglais. La comédie c’est vrai que cela m’intéresse moins. »

Enfin pour terminer notre interview, nous posons souvent cette question à laquelle beaucoup  ne souhaite pas répondre. Que penses-tu de l’évolution de la société actuelle et surtout des derniers conflits sociaux en France ?

« Au début les gilets jaunes c’était quelque chose qui me parlait. La cause est noble. Après je trouve que ca dérive complet. J’estime qu’on ne fait pas la révolution en emmerdant le peuple. Si tu veux faire la révolution, prends ton fusil et monte à l’Elysée. Moi je connais des gens comme toi et moi qui ont fermé leur boutique à Toulouse à cause de cela et c’est plutôt triste et contreproductif à mon sens. »

Merci à toi Furax, de nous avoir accordé cette interview, nous te souhaitons d’avoir le succès que tu mérites pour ton prochain album. En tout cas à Dynam’hit nous resterons à l’écoute de tes futurs projets.

Furax Barbarossa - Dynam'hit - Mona Lisa - Rap - Webradio - Interview

Furax Barbarossa sera en concert le 22 février à Saint-Etienne (lien vers les places) et le 28 février à Lille (lien vers les places).

Lucas.