Après plusieurs dates en France, dont le Zénith de Paris le 26 Novembre, les virtuoses mexicains Rodrigo Y Gabriela arrivent en trombe à Marseille pour le plus grand plaisir de tous. Ce live, c’était comment alors ? Tout simplement épatant. Récit.

C’est avec un peu de retard que nous arrivons au Dock Des Suds et constatons que le Mexique a déposé ses bagages avant nous : la chaleur de la Salle des Sucres est étouffante. Mais il en faut plus pour nous arrêter : pendant que les dernières notes de la reprise de Stairway To Heaven de Led Zeppelin résonnent encore, nous nous frayons un passage dans la salle archi-comble. D’ailleurs la composition de l’assemblée est très variée: des jeunes, des moins jeunes, des familles, des amoureux et même des metalleux, fans de la première heure. Pleine à craquer certes, mais l’ambiance n’y est pas très folichonne : les applaudissements sont un peu fébriles mais ce n’est que le début du show, rien de dramatique.

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Pour le passionné de metal, le début du concert est une véritable aubaine. Quel rapport me direz-vous, entre le méchant-metal-satanique-tortureur-de-chatons et le gentil-tout-mignon-flamenco-protecteur-de-chatons ? Revenons un peu sur l’histoire des deux «  guitarillos » : refusés au Conservatoire du Mexique, Rodrigo Sánchez et Gabriela Quintero se rencontrent et forment un groupe de trash metal : Tierra Acida. C’est en 2001 qu’ils décident de revenir à une musique latino, aux influences multiples, du rock au metal, en passant par le jazz, le blues et même la folk. Ils connaissent alors un succès fulgurant.

Bref, revenons à nos tacos. Après quelques arpèges et rythmiques dont ils détiennent le secret et le mythique Diablo Rojo, « Rod Y Gab » s’amusent à reprendre des chansons du répertoire de Metallica, groupe pilier du trash metal. Orion et Battery sont de la partie, et les metalleux de la salle sont heureux : les « cornes du Diable » sont pointées vers le ciel. Je fais partie de ces joyeux lurons.

C’est à la fin de Battery que Gabriela essaie tant bien que mal d’échanger dans un français teinté d’espagnol avec le public : la charmante demoiselle explique les influences du duo, quand ils étaient membre de Tierra Acida… Quel bonheur d’entendre des noms tels que Testament, Slayer ou même Anthrax ! C’est vrai que certaines chansons dans leur structure ressemblent à du « metal acoustique » et ce n’est pas pour me déplaire.

C’est après ce petit monologue que Gabriela enchaîne sur son solo : de la rythmique pure et dure. C’est toujours impressionnant de voir ce genre de prestation, et « Gab » est une machine dans ce domaine : le public se décoince un peu et commence à jouer le jeu en tapant en rythme (pas facile pour certains d’ailleurs).

Une caméra, accrochée au manche de chaque guitare, filme les doigts des deux guitaristes et la vidéo est retransmise en direct sur le background de la scène : plutôt impressionnant, cela nous prouve encore une fois la dextérité du duo.

Les chansons se succèdent, Rodrigo joue son solo et l’ambiance est de plus en plus torride. C’est à ce moment que Rod fait une annonce, qu’il qualifie lui-même d’exceptionnelle, si bien qu’il propose au public de sortir leurs smartphones et de le filmer. Dans un français approximatif, le guitariste fait un hommage et dédie la tournée aux 43 étudiants mexicains enlevés il y a quelques mois près d’Iguala, dans leur école normale rurale Ayotzinapa. Le public applaudit, l’hommage est louable.

Le concert repart, et après quelque chansons, le duo fait monter deux personnes sur scène : les heureux élus sont aux anges et l’émotion se lit sur leur visage. Ce sera une soirée inoubliable pour eux, les chanceux reçoivent même un médiator en cadeau.

C’est bientôt la fin du concert mais les deux génies préparent une surprise : Rodrigo s’empare du micro, se racle la gorge et joue quelques accords. Le public a  immédiatement reconnu : contre toute attente, le duo se lance dans une reprise de Radiohead. Creep est chantée par tout le public et les bras se balancent en rythme : dommage qu’une telle ambiance ne soit présente que sur un titre qui n’est même pas des mexicains.

La fin du concert va me faire rapidement mentir : après un rappel, le groupe revient sur scène et lance son plus fameux « tube » Tamacun. Le public est fou, tout le monde hurle et le son est parfaitement réglé sur cette chanson : l’une des meilleures prestations de la soirée.

Le concert touche à sa fin et les applaudissements durent quelques minutes : Rodrigo et Gabriela remercient chaleureusement le public, avec en fond sonore Thunderstruck d’AC/DC, qui fera bouger une dernière fois la tête des plus vaillants.

C’est donc une performance bluffante que nous a livré Rodrigo Y Gabriela ce soir : Rodrigo toujours en forme, manie la guitare avec une facilité déconcertante. Gabriela, elle, en alternant grattage de cordes et percussions sur la guitare, a donné l’impression de faire office à elle seule d’un orchestre à part entière. Un concert exceptionnel avec des musiciens exceptionnels.

Merci à la SAS et au Dock des Suds pour cette soirée enflammée.

Rédigé par

Alexis Tisserand

Sec Gé // Pôle rédac // Rock Pulse // Dead Pixel