J.J. Abrams a été une sorte d’idole, fut un temps. C’était le type qui avait créé Alias, puis Lost. Il avait révolutionné la série télévisée, il avait introduit de nouveaux modes de consommation nourris par l’immense base de fans de l’univers de Lost. Et même aujourd’hui, après la fin minable que ses scénaristes et lui nous ont infligée sur l’île de Lost, un nombre incroyable de critiques, de chercheurs, de sériephiles et de fans continuent de s’interroger sur les mystères et les significations de la saga qu’a constitué Lost. Reconnaissons donc un instant les mérites de Jeffrey Jacob, avant de s’aventurer dans une critique méchante et gratuite de son dernier concept raté: Revolution.

Présentation de la série

A moins d’être complètement déconnecté de l’actualité des séries, vous n’avez pas pu manquer la promotion de Revolution durant l’année 2012, nous promettant un pitch enthousiasmant à base de chasse à l’arc, d’éclairage à la bougie et de scènes d’action épiques.

Pour être plus clair, le synopsis se résume à un concept plutôt intéressant: la planète entière vit un blackout, obligeant les êtres humains à réorganiser leurs habitudes de (sur)vie. Quinze ans plus tard, la gentille famille Matheson à têtes blondes voit ses membres séparés par la Milice qui gouverne désormais les Etats-Unis.

Revolution – Trailer – VOST par Suchablog

Le casting se compose de grands acteurs, chacun ayant joué dans d’illustres productions telles que Twilight (Billy Burke, J.D. Pardo), ou ayant été recyclé à partir d’autres séries produites par J.J. Abrams (Elizabeth Mitchell, Zak Orth). On retrouve cependant le grand Giancarlo Esposito (Gus Fring qu’on a pu apprécier dans Breaking Bad).

Pourquoi est-ce si nul?

Le premier indice est tout simplement l’épisode pilote.

Un épisode pilote est le premier épisode d’une série, il est souvent mauvais puisqu’il a énormément d’objectifs à remplir en un minimum de temps : planter le décor, lancer l’intrigue et présenter les personnages tout en gardant un rythme plus ou moins soutenu. J’ai donc tendance à être indulgente avec les pilotes, même si mon instinct, comme le vôtre, va m’inciter à continuer ou arrêter la série.

Le problème de l’épisode pilote de Revolution est multiple: il se veut accrocheur dans les premières minutes, et réussit plutôt bien son coup, mais nous perd par la suite. On sent très vite quel sera le rythme de la série : scènes d’action à chaque épisode, cliffhanger de fin d’épisode, flashbacks sur la vie de chaque personnage entrecoupés de regards dans le vide. Au lieu de nous immerger progressivement dans l’univers, la série nous harcèle de coups de théâtre pendant 45 minutes, sans qu’on ait le temps de s’attacher aux personnages. On finit par regarder avec indifférence le père de Charlie se faire tuer et Danny se faire enlever par la méchante milice (Ndlr: ceci n’est pas un spoiler puisqu’il advient dans les 15 premières minutes du pilote) .

La deuxième raison pour laquelle Revolution est une mauvaise série est l’accumulation de clichés qu’elle a tendance à créer. On finit par soupirer d’ennui en voyant l’univers sans saveur et sans originalité que nous retranscrit Kripke, le créateur de la série.

Les thèmes abordés n’ont rien de neuf, et Pierre Sérisier, critique au Monde, [nous énumère parfaitement dans son billet les poncifs de Revolution ->http://seriestv.blog.lemonde.fr/2012/09/06/revolution-lart-de-tourner-en-rond/]: la réunion de la cellule familiale dans le cadre de la survie, la remise en question des anciens modes de vie, la lutte contre un pouvoir oppressant et militaire, le retour à l’état sauvage…

Ces banalités ne sont pas seulement dans le message divulgué au spectateur (message un tantinet conservateur, voire réactionnaire); elles le sont dans la mise en scène, dans les dialogues et dans la réalisation de la série. Ici, aucun risque n’est pris: la mise en scène appuie de façon pesante sur le drama, la caméra filme avec lourdeur les regards des personnages, et les dialogues sans saveur semblent avoir été mille fois répétés dans d’autres séries ou films. La mise en scène de la mort du père est un exemple frappant (mais malheureusement pas unique) du manque d’originalité de la réalisation.

La dernière raison est tout simplement le manque d’ambition de la série. Cette dernière se présente comme un nouveau concept fort et original, mais ne fait que reprendre pour la pénultième fois de vieilles idées en leur ajoutant des scènes d’action nerveuses mais peu crédibles.

Faisons d’ailleurs une parenthèse sur la cohérence de la série: j’ai du mal à croire que des individus ayant vécu 15 ans sans électricité puissent avoir des vêtements immaculés, se promener la crinière brillante avec de minuscules sac à dos censés comporter de quoi camper. La mode vestimentaire s’est d’ailleurs étrangement accommodée du blackout pour revenir quelques siècles en arrière: on a l’impression de voir un mélange entre Amish et Cow-Boys.

Finalement, Revolution est surtout de la science-fiction du pauvre: celle qu’apprécie le grand public pour ses scènes d’actions et ses décors pittoresques, sans entrer réellement dans la complexité du genre SF. Et si l’on s’efforce de ne pas soupirer devant les évidents dénouements de Revolution, on pourra savourer les scènes de qualité que nous offrent Giancarlo Esposito et Elizabeth Mitchell, ou juste apprécier l’esthétique des arcs, des arbalètes et des combats à l’épée.

Pour aller plus loin: [la critique de Perdusa sur les Nouveaux Lost->http://www.a-suivre.org/usa/+revolution.html]

Rédigé par

Marie Ozymandias

Former member