S’il n’y a pas de têtes d’affiches comme la FF l’était dans les années 1990, début 2000, Marseille reste une ville qui respire le Hip Hop. Que ce soit à travers Soprano et sa clique des Psy 4 de la rime ou encore la poétique Keny Arkana, notre belle cité phocéenne regorge de talents en tous genres. Et parmi tous ces genres, on retrouve un crew de 8 extraterrestres. Tous Salopards, voilà leur nom, qui annonce déjà la couleur. On y retrouve Poz, L’ami Caccio, Aksang, Assono, Yul, Tetris Syzif, Hermano Salvatore et Lamanif, les 3 derniers ayant déjà participé à plusieurs RC, ce qui a fait grimper la notoriété du groupe.

Mais ne nous enflammons pas, Tous Salopards reste un groupe méconnu du public de rap français, en tout cas du public non marseillais, les 8 hommes ayant écumé les différentes salles de concerts marseillaises ainsi que des proches alentours dans le but de faire leur trou dans ce monde ingrat qu’est le Hip Hop indé mais étant aussi les représentants de la région PACA pour la finale nationale du tremplin Buzz Booster qui se déroulera le 9 mai prochain à l’Affranchi.

Je les ai découvert grâce aux performances hors du commun de Lamanif aux Rap Contenders et ma curiosité m’avait guidé à leur performance au Molotov en fin d’année dernière, ou nous avions pu les interviewer, interview durant laquelle ils arboraient fièrement leurs textiles estampillés Bouillabaisse, projet dont ils étaient très heureux de nous parler à l’époque. Et c’est récemment que je suis retourné les voir, à l’Affranchi cette fois, à l’occasion de la venue des Rap Contenders pour les demi-finales Espoir et la draft. Mais cette fois ci je n’étais plus dans l’inconnu, en effet, les marseillais avaient eu la bonne idée de nous partager trois freestyles, aux influences culinaires, pour annoncer l’arrivée toujours plus prochaine de leur projet : Le pastis et les olives, Sur le Feu et La Digestion ; mais aussi le premier extrait de ce projet, Mars Attack, au clip plus que farfelu mais qui confirmait les nombreuses promesses apportées par les trois freestyles.

Et quelques semaines plus tard, nous y voilà. Entre temps les Tous Salopards ne sont pas restés silencieux non plus, on a ainsi pu découvrir le deuxième et le troisième extrait de Bouillabaisse, respectivement L’absinthe et Tous à l’eau plate, les deux accompagnés d’un clip. C’est avec hâte et toujours un peu de curiosité quant à la diversité musicale et thématique de ce que pouvait nous offrir les 8 salopards dans leur premier projet commun que je me suis procuré Bouillabaisse.

Première remarque, le plat est gourmand, en effet on peut retrouver la bagatelle de 17 titres pour une durée de 1h20 de sons en continu, ce qui en fait, sur la forme pour commencer, un projet très abouti.

Reste maintenant à s’intéresser au fond. Il ne serait pas judicieux de s’attarder sur chacun des 17 sons car cela ne serait pas intéressant à lire et il est important de vous laisser assez de curiosité pour que vous alliez écouter cet album.

Voilà pourquoi mon analyse sera plus générale. Si on doit segmenter ce projet, on trouve de tout. A la fois du rap assez loufoque/egotrip instauré notamment par les deux premiers sons Mars Attack que j’ai déjà présenté mais aussi One Man Show dont l’intro me fait encore sourire après une dizaine d’écoutes. Des morceaux qui sont plus centrés sur les aventures vécues par le groupe dans leur quête du succès sur la scène du Hip Hop indépendant (C’est dans l’ombre, Quand j’écris ça) mais aussi des morceaux plus intimes, plus mélancoliques sur les vies quotidiennes des rappeurs (Période de Vie, J’assume). Au niveau des prod, la richesse musicale est au rendez-vous et pour ma plus grande joie la majorité des instrus sont composés d’un beat et de différents instruments de musique selon l’influence recherchée, pas de sonorités électroniques, pas de trap, c’est tellement mieux comme ça.

Je tiens quand même, histoire de vous mettre l’eau à la bouche, à m’attarder sur les morceaux qui m’ont spécialement marqué. En commençant par une ode à la musique, une sorte d’hommage à ce qui au final représente la base de toute musique y comprit du rap, je parle là des instruments. C’est dans Bœuf qu’on retrouve cet hommage en rimes, le son est vraiment bon et la structure très bien pensée. Chacun des rappeurs s’attarde sur un instrument en enchaînant jeux de mots, champs lexical autour de la musique finement placé mais aussi un magnifique jeu avec l’instru qui est composée à chaque fois de l’instrument traité dans le couplet.

Le deuxième morceau qui m’a marqué c’est Début de milieu de fin de journée. Car oui le rap est le style de musique le plus approprié quand on veut raconter son histoire, mais c’est aussi un instrument exceptionnel pour raconter d’autres histoires et ça rend d’ailleurs très bien la plupart du temps. Mais Hermano, Aksang, Tetris, Assono et Lamanif ne s’arrêtent pas là. Ce que j’ai vraiment apprécié dans ce morceau, c’est le fait que toutes les histoires soient liées car ça lui donne encore plus d’originalité et les transitions sont ainsi encore plus percutantes.

Enfin, concluons sur un dernier son, un des trois extraits sortis en avance et que j’ai le plaisir de poncer depuis deux semaines maintenant, c’est L’absinthe. Pourquoi ? J’avoue que ce n’est pas forcément le son le plus élaboré de l’album, mais le refrain est très accrocheur et rentre dans la tête en un clin d’œil, la prod est simple mais la simplicité est parfois la clé d’une track réussie en matière d’instru et puis tous les couplets sont bien maîtrisés, What else ?

Je ressors très satisfait de ce premier album de Tous Salopards, encore plus convaincu qu’avant que cette grande bande de potes a les moyens pour faire son trou dans ce rap français aux multiples visages.

Rédigé par

La Monf'

Défenseur du vrai Hip-Hop, amoureux du rythme et lyriciste babtou // 100% Sport, Matinale, Back2Black