Le dernier album de Charles Bradley, Victim Of Love est sorti il y plus de trois semaines. Une éternité pour le monde de la soul music ? Pas tellement quand on sait que « Black Velvet » a attendu 63 ans pour sortir son premier album, No Time For Dreaming en 2011. Parler d’un « album de la confirmation » pour Charles Bradley serait indécent envers cet homme à l’âge et, désormais, la réputation avancés. D’autant plus qu’à chacune de ses apparitions il démontre qu’il est bien l’un des plus grands soulmen de tous les temps, dans la lignée de ses illustres pères (pairs ?) Otis Redding & James Brown.

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Le début de l’histoire telle qu’on la connaît commence en 2011 avec le succès flamboyant du remarquable No Time For Dreaming. Charles Bradley acquiert une reconnaissance internationale et se pose comme l’un des derniers grands représentants de la soul music. Et ce, grâce au label Daptone qui tente de raviver la flamme soul/funk des années 1960-1970 grâce à des artistes signés comme : Sharon Jones & The Dap-Kings, Antibalas, The Budos Band et The Menahan Street Band. The Menahan Street Band qui a accompagné Charles Bradley sur No Time For Dreaming mais également sur l’album Faithfull Man de Lee Fields, sous le pseudonyme de The Expressions.

Mais c’est accompagné de His Extraordinaires (emmenés par Thomas Brenneck, membre du Budos et du Menahan) que Charles Bradley remonte sur les planches, toujours plus étincelant, toujours plus habité. Car sous ses airs de bonhomie apparente, Charly n’a pas attendu que le tapis rouge se déroule devant lui pour monter sur scène. Enfant des rues de Brooklyn, il a d’abord été cuisinier pendant plus de 40 ans et a connu l’assassinat de son frère par son neveu. Ce n’est qu’après avoir vadrouillé de la Californie à l’Alaska en passant par le Canada qu’il revient chanter dans les bars de Brooklyn (où il sera repéré par Daptone), revisitant le répertoire de James Brown.

Charles Bradley se dit pourtant être aujourd’hui une Victim Of Love. L’artiste transpire sa vie, ses affres, ses tourments. On retrouve toujours cette voix soul déchirante qui se pose parfaitement sur des mélodies groovy léchées par les musiciens de chez Daptone. Stricly Reserved For You est une belle illustration de ce que sait faire Bradley et ce que peut apporter Brenneck. On connaissait Charly très à l’aise sur les cuivres (Let Love Stand A Chance, You Put A Flame On It) mais la ferveur de guitares sur cet album est marquante. Que ce soit de manière intime sur le surprenant mais non moins déplaisant Victim Of Love ou sur Where Do We Go From Here ? pour le coup très 60’s. Certains morceaux comme Confusion sont même à la limite du psyché. Dusty Blue, excellent morceau instrumental, fait office de transition vers ce domaine que Charly a eu moins l’habitude de côtoyer ces soixante dernières années. Ce qui parfois nous rappelle que ce n’est que le second album studio du Black Velvet qui reste avant tout un homme de scène. L’ultime chanson de l’album, Through The Storm, qui a beau tenter d’apaiser les (d)ébats, arrive bien trop tôt. Comme si on avait demandé au « Sreaming Eagle Of Soul » de se poser précipitamment.

Parce qu’au final, Charles Bradley ne fait pas que chanter, il pleure ses désenchantements, il crie sa douleur, et ne semble pas avoir eu les mêmes histoires d’amour que tout le monde.

Pas la même histoire que tout le monde d’ailleurs.

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Rédigé par

Léopold S.

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