Le 3 décembre dernier se sont réunis plusieurs dizaines de collectifs issus du milieu de la free party pour protester. Près de 15 000 personnes se sont regroupées à Saint-Brieux et plusieurs milliers dans d’autres villes. La raison ? Mener une action revendicative pour protester (ou pas), contre les violences policières, la perquisition du matériel ou certaines mesures législatives prises à leur encontre. Cependant, cette situation n’est pas nouvelle et elle fait partie de l’ADN de ce mouvement culturel, musical et contestataire. Reportage.
Tout débute dans les années 60, les premières fêtes « sauvages » ont lieux en même temps dans différents endroits à travers le monde, que ce soit en Europe ou aux USA. Le mot « rave » devient, indépendamment des soirées, un terme usuel utilisé pour décrire la musique de groupes garage rock et psychédéliques. Le concept est le même : se réunir autour de la musique, que ce soit en pleine nature, en ville ou dans des lieux déserts.
Ce n’est que dans les années 1980 avec l’apparition de l’Acid house à Chicago que le terme prendra sa signification actuelle mais sa base idéologique reste toutefois un refus des valeurs mercantiles du système et la recherche de la transcendance au travers de la musique. Ce sous-genre de la house se caractérise par une ligne de basse omniprésente et par l’utilisation d’un synthétiseur (dont la fameuse Roland TB-303).
Cette culture se répandra progressivement et c’est en Europe à la fin des années 1980 où l’Acid house, qui est déjà dans les clubs britanniques, investira les premières fêtes électroniques clandestines. La raison se trouve dans la politique de répression (aussi liée aux drogues) du gouvernement Thatcher qui promulgue une série de loi qui associe la vente de l’alcool en club et la fermeture des mêmes enseignes. Les boites ferment beaucoup plus tôt et les clients se retrouvent à l’extérieur vers 2h du matin. Des dizaines de milliers de fêtards s’organisent alors dans tout le pays pour investir illégalement des lieux insolites (la localisation est révélée au dernier moment grâce à une infoline ou autre) pendant parfois plusieurs jours d’affilés. C’est aussi à ce moment que la culture rave et la tradition des « travellers » se rejoignent (des communautés nomades originaire d’Irlande ayant un langage et des coutumes qui leur sont propre). Les ravers prennent modèle sur les travellers et s’organisent en sound system itinérants pour colporter le nouveau son à travers le pays.
Un sound system, à la base une expression désignant le matériel de sonorisation transportable (ou aussi « discomobile »), est employé par extension pour désigner un collectif d’artistes mais aussi de techniciens que l’on pourrait presque comparer à un label. Cette effervescence va conduire à la diffusion d’une multitude de sous catégories de musiques éléctroniques au début des années 90 : techno, hardtechno, minimal, tribe, drum and bass, trance, goa, breakbeat, gabber et autres…
Ces nombreux groupes s’occupent alors de promouvoir leur soirée, parmi les plus connues on peut citer Genesis ’88, World Dance, Helter Skelter ou Energy. Mais certains sound system vont se détacher du lot, c’est le cas des « Spiral Tribes » qui vont promouvoir un nouveau concept de soirée qui se détache aussi sur le plan idéologique : les free party.
Au niveau musical les free party sont généralement plus radicales que les rave party avec des sonorités sèches calibrées sur un rythme élevé où on retrouve plusieurs genres : hardtek, hardcore, jungle , acidcore … Mais une free party se distingue en réalité par le fait que les participants considèrent qu’ils sont libre car ils créent une zone éphémère qui est autonome (T.A.Z : Temporary Autonomous Zone). Sur ces lieux, l’état n’a pas de droit et ne peut faire preuve d’aucune autorité. Elle se base aussi sur free dans le sens de gratuit : elle l’est au début, mais plus tard une donation peut être demandée à l’entrée sous n’importe quelle forme (argent, cigarette …).
Le 3 novembre 1994, le parlement britannique vote la clause Criminal Justice Bill du Criminal Justice and Public Order Act qui définit la rave comme « un rassemblement en plein air de cent personnes et plus dans lequel de la musique amplifiée caractérisée par des pulsations répétitives est jouée pendant la nuit ». Cette situation fera déménager plusieurs sound system en Europe -dont les Spiral Tribe - qui passeront notamment par la France. D’autres sound system se regrouperont eux aussi dans différent pays et elle peut être dans un cadre légal (beaucoup de rave party, plus populaire et attractive)
La France accueillera les plus gros teknival (plusieurs sound system à un même endroit) allant jusqu’à 100 000 personnes (comme celui de Chavannes le 1er Mai 2006, autorisé par l’Etat). Là aussi certains groupes se feront remarquer, en particulier les Heretik (les organisateurs de la soirée à la piscine Molitor en plein Paris en 2001 ou à celle de Chavannes ).
Ils sont originaires de France depuis leur création en 1996. Il s’agit aussi d’un sound system contestataire et ils sont considérés sont comme des pionnier de la scène électronique underground en France avec plus d’une centaine de vinyles et plusieurs CD à leur actif. A leurs débuts, ils dénonçaient notamment la marginalisation que subissait les artistes techno tout comme les dérives qu’entrainait la trop grande popularité du mouvement mais ils s’éloignent peu à peu de leurs convictions.
Les derniers membres les plus populaires sont cependant toujours en tournée à l’occasion de leur 20 ans -la dernière date à Lyon en Décembre dernier pour la Dantesk.