rap mauvaise image

Pourquoi le rap a t-il aujourd’hui une si mauvaise image ?
Cette question, en tant que grand fan de cette musique je me la pose tous les jours, et beaucoup de raisons me viennent spontanément. La première qui me vient à l’esprit est le manque de curiosité des mass médias pour le rap.

Quand je parle des médias je parle bien sûr de la télé, qui ne diffuse sur toute sa grille qu’un seul programme Hip Hop. Et encore, Piège de Freestyle, le programme en question, qui consistait à faire réagir les rappeurs sur les sujets de l’actualité chaque semaine a fini récemment sa pige de 1 an à la télé en collaboration avec France 4, aucun renouvellement n’étant prévu pour l’instant. Comment se fait-il qu’une musique qui réunit tant d’adeptes sur internet ne trouve pas une place dans la grille télévisée comme c’était d’ailleurs le cas dans les années 1980-1990. Certes il nous arrive de voir des artistes rap faire leur promo sur des plateaux télévisés, mais il faut être un artiste avec une très forte notoriété pour avoir une chance. Un jeune espoir du rap n’aura aucune chance de performer en live sur une émission en access (avant le prime time) alors qu’on ne compte plus les artistes pop anglophones méconnus qui ont eu cette chance durant l’année.

Mais outre le manque total d’intérêt de la TV pour le rap, le média qui lui fait le plus de mal est sans aucun doute la radio. Et pourtant vous me direz, contrairement à la télé, on retrouve aujourd’hui plusieurs chaînes de radio diffusant du rap et vous aurez raison, mais c’est sûrement le plus gros facteur de la mauvaise image qu’a le rap aujourd’hui en France. Skyrock et Générations sont les plus connus du grand public, et c’est lorsque vous écoutez ces radios et que vous n’êtes que néophytes du rap que vous construisez dans votre tête une image du rap totalement erronée. Et cette constatation ne date pas d’hier, en effet, aujourd’hui les deux stations citées précédemment passent les tubes d’aujourd’hui que ce soit du Black M, du Alonzo, du Booba ou du Team BS, on pourrait caractériser la période musicale que nous vivons comme un mix entre du thug et de la soupe rapologique, qui virerait presque à du R&B (on peut remercier l’inventeur du vocodeur). 

Sauf qu’il y a quelques années (moitié-fin des années 2000) nous avons traversé une période « creuse » du rap français, où les MC véhiculaient tous un message de bad boy sans imagination aucune, cette époque où on a vu apparaître des K’Maro ou autres soi-disant rappeurs dont le vocabulaire limité n’a fait que faire oublier aux gens que le rap était avant tout un art descendant de la poésie, en y ajoutant du rythme et un jeu avec les mots encore plus sophistiqué. Ne vous méprenez pas, je ne dis pas qu’il n’y a eu aucun bon rap durant cette période, juste qu’il y a eu beaucoup de mauvais rap. Et cette période a fait beaucoup de mal au Rap, premièrement car beaucoup de rappeurs d’aujourd’hui ont grandi avec ce rap dans les oreilles mais aussi car il a participé à la détérioration de l’image de la musique Hip Hop auprès du grand public.
Une fois de plus, on ne peut pas imputer la mauvaise image du rap à cette période. Le rap depuis sa création est une musique provocatrice, réactionnaire qui s’est développée dans les quartiers les plus pauvres et dont le but premier est de critiquer les vices de la société en place. On l’a longtemps caractérisé comme musique du « ghetto ». Mais il est important pour moi de profiter de cet article pour vous dire que ce n’est plus le cas et depuis longtemps. Et c’est là où l’on reproche aux mass-médias et plus particulièrement aux grandes radios, qui ne passent que du rap pauvre depuis maintenant presque 10 ans. En effet on a vu se développer de nombreux styles de rap, tous plus élaborées que les autres, tous plus musicaux, dont les textes sont extrêmement travaillés et les rythmes plus doux ou plus énergiques sans être abrutissants.

Mais comme disait I.N.C.H, beatmaker, lors de notre interview avec VALD, le problème c’est aussi le manque de curiosité du grand public. Si le public ne fait qu’écouter la musique qui passe à la radio, alors ce sont ces musiques qui vont avoir le plus de succès et même proportionnellement une énorme part du succès de la musique Hip Hop, ce qui encouragera les radios (dont le rôle est de passer ce qui plaît au plus grand nombre il faut leur concéder) à continuer sur cette voie et nous fait entrer dans un cercle vicieux dont on ne voit pas comment en sortir.

La solution ? Internet en est une comme le montre la montée en puissance de toute la jeune génération indépendante dans la lignée d’1995 grâce à Youtube et aux réseaux sociaux, si aucune radio ne se décide à prendre des initiatives (ce n’est même pas des risques quand on voit le succès du rap français non labellisé sur internet sans avoir eu l’aide à la visibilité de la radio). Ah oui car du coup on pourrait évoquer le problème des maisons de disques mais pour moi ce n’en est pas un. En effet, les maisons de disques sont comme les actionnaires d’une société mais au lieu des parts d’une entreprise ils possèdent les parts d’un projet musical et cherchent donc à tout prix le succès afin de récupérer le plus d’argent, et comme je disais précédemment, le grand public ne s’éloigne que trop peu des plates-bandes de la radio, les maisons de disques ont donc pour objectif de faire en sorte que les artistes fassent de la musique qui passera à la radio, ce qui pour le rap revient à dire de la musique formatée.

Je finirai ce développement sur une différence de jugement assez cocasse. Je parle de la différence de jugement qui se fait entre le rap FR et le rap US par le public français. Ce qu’il faut savoir c’est qu’une majorité du grand public préfère écouter du rap US plutôt que du rap français. Pourtant les productions sont similaires et tendent de plus en plus à être exactement les mêmes vu que les beatmakers s’internationalisent de plus en plus. Si ce n’est pas les prod’, ça ne peut être que pour un des deux autres composants du triptyque du rap (prod’, flow, texte). Les flows sont tous uniques, même si certains se ressemblent et même si la langue parlée influe sur le rendu général du flow, je doute que ce soit la seule raison. J’ai bien peur que les gens qui ont une image négative du rap français due aux paroles vulgaires de certains sons passés à la radio, se rabattent sur du rap US, sans même savoir que les paroles sont les mêmes car ils ne les comprennent pas. Je dirais même que la richesse de notre langue, reconnue à l’international, offre bien plus de possibilités textuelles que la langue de Shakespeare. Donc si j’ai un conseil à donner aux personnes qui ont une mauvaise image du rap français, ouvrez votre esprit et explorez tout ce que cette musique, qui reste une jeune musique, a encore à nous offrir.

Concluons sur quelques sons que je vous conseille et qui devraient vous faire réfléchir quant à ce qu’est réellement (ou aussi) la musique Hip Hop :

 

Cette liste n’est pas un classement, il y en a tant d’autres qui ne me passent pas par la tête au moment ou j’écris cet article, mais j’espère que ces 10 échantillons achèveront ma tentative de montrer le vrai visage du rap français qui à mon humble avis, est plus que positif.

PS : Cette chronique est bien sûr subjective, ce n’est que la vision d’un jeune fan du Hip Hop qui cherche à ouvrir des yeux.

Rédigé par

La Monf'

Défenseur du vrai Hip-Hop, amoureux du rythme et lyriciste babtou // 100% Sport, Matinale, Back2Black